ISSN 2271-1813

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Dictionnaire de la presse française pendant la Révolution 1789-1799

C O M M A N D E R

   

Dictionnaire des journaux 1600-1789, sous la direction de Jean Sgard, Paris, Universitas, 1991: notice 1122

PIÈCES FUGITIVES D'HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE (1704-1706)

1Titres Pièces fugitives d'histoire et de littérature anciennes et modernes: avec les nouvelles histoires de France et des pays étrangers sur les ouvrages du tems, et les nouvelles découvertes dans les arts et les sciences: pour servir l'histoire anecdote des gens de lettres.

Puis en 1705 et 1706: Pièces fugitives anciennes et modernes, des auteurs connus et inconnus, et les fragmens de celles qu'on ne sçauroit plus trouver.

2Dates La «première partie» parut en mai 1704 et la dernière après le 28 janvier 1706, date de son approbation. Les cinq parties sont reliées en deux volumes à la B.N. Un premier privilège local fut accordé le 27 mars 1704 (B.N., ms. f. fr. 21939, fº 105r) et enregistré le 2 mai suivant. Un second privilège en date du 26 juillet 1705 fut enregistré le 29 juillet suivant. Le Prospectus recueilli par le père Léonard de Sainte-Catherine (A.N., M 760, nº 114) n'est pas daté.

Les libraires ne respectèrent pas la périodicité bimestrielle au delà de la deuxième partie, et après les trois livraisons de 1704, l'ouvrage devint un recueil annuel en 1705 et 1706.

3Description Cinq parties in-12: 238 p., 193 p., 190 p., 106 p. et 168 p.

4Publication A Paris, chez Jean Cot, rue Saint-Jacques à l'entrée de la rue du Foin, à la Minerve, pour l'année 1704. Et à Paris, chez Pierre Giffart, rue Saint-Jacques, près les Mathurins, à l'Image Sainte-Thérèse, pour 1705 et 1706.

5Collaborateurs L'abbé Anthelme TRICAUD (pseudonyme Flachat de Saint-Sauveur) et Jérôme DU PERIER (pseudonyme Sieur d'Aiglemont).

6Contenu Le Prospectus annonça en plus de pièces fugitives sur des sujets anciens ou modernes, des nouvelles des lettres, des sciences et du Palais. Dans sa deuxième version de 1705 et 1706, l'ouvrage se cantonna au premier point.

7Exemplaires Collection étudiée: B.N., Rés. Z 2910-2911; autre collection: B.M. Lyon 345870.

8Bibliographie DP2, art. «Du Perier» et «Tricaud».

Mention dans Nouvelles de la République des Lettres, juil. 1704, p. 109. – Ancillon C., Mémoires concernant les vies et les ouvrages de plusieurs Modernes célèbres dans la République des Lettres, Amsterdam, 1709, p. XIX. – Quérard, Supercheries, t. II, p. 48.

Historique Comme nombre de revues de la fin du XVIIe siècle et du début du XVIIIe les Pièces fugitives présentent, aujourd'hui masquées par l'uniformité de la reliure, deux aspects qui résultent d'une modification de la formule éditoriale entre 1704 et 1706.

Sollicité par Du Perier qui se disait libraire, le privilège qui fut accordé le 27 mars 1704 au Sieur Flachat de Saint-Sauveur découle des aménagements introduits par l'abbé Bignon à la direction de la Librairie: autoriser la parution d'un périodique par un privilège local réservait les droits des ouvrages protégés par un privilège général tout en faisant place à de nouveaux titres. L'abbé Anthelme Tricaud qui se dissimulait sous le pseudonyme de Flachat de Saint-Sauveur publiait depuis l'été 1702 les Essais de littérature et il poursuivit ses activités par une collaboration au Journal littéraire en 1705 et la confection, de 1705 à 1710, de nouvelles de littérature manuscrites pour les moines de la Grande-Chartreuse, toutes entreprises qui correspondaient autant à la recherche d'un revenu qu'à celle d'une position parmi les lettrés. On ne connaît pas exactement le rôle de Jérôme Du Perier dans les débuts de l'entreprise, simple collaborateur d'Anthelme Tricaud, ou véritable rédacteur qui aurait eu besoin d'un patronage auprès de la Chancellerie et des libraires.

Le Prospectus, sauvé par le père Léonard, annonça un bimestriel in-12 «de huit ou neuf feuilles d'impression» composé de deux parties: une série de pièces fugitives, anciennes ou modernes de toute nature, reliées par des transitions servant à les présenter et à les juger, après lesquelles venaient des nouvelles littéraires très variées puisqu'aux informations sur les nouveaux livres, les manuscrits, les «démèlez qui arriveront parmi les Gens de Lettres», les sciences mêmes, l'auteur ajoutait le «précis des plus célèbres causes» plaidées au Palais qu'il disait reprendre du premier projet du Journal des savants.

Trois parties parurent en 1704, la première au mois de mai, la seconde après le 17 juillet et la troisième après le 17 novembre, dates de leur approbation par les censeurs. La Préface amplifiait la présentation du Prospectus par le thème classique de la multiplication des revues depuis la fondation du Journal des savants, le journaliste relevant même pour légitimer sa propre création le récent foisonnement des revues allemandes: Nova Literaria Maris Balthici (1698), Monatlicher Auszug (1700) et Nova Literaria Germaniae (1703). Les journalistes de Hollande signalèrent l'intérêt de ces Pièces, tout en déplorant le ton critique du rédacteur qui contrairement aux usages de la confrérie se plaisait «à mordre».

La rupture du rythme bimestriel entre la deuxième et la troisième partie peut s'expliquer par les poursuites engagées contre Tricaud, sous prétexte de jansénisme; le journaliste interrompit aussi ses Essais de littérature après le volume d'août et il fut exilé à Lyon en décembre. L'entreprise changea alors de mains: Du Perier reçut, sous le pseudonyme d'Aiglemont, un nouveau privilège en juillet 1705, et il modifia le titre de l'ouvrage et sa formule en supprimant les transitions entre les pièces publiées et en abandonnant les nouvelles littéraires et les extraits, pour «se renfermer uniquement dans ce que le titre promet» (Préface de 1705). De nouveau annoncées comme bimestrielles, ces Pièces ne parurent que deux fois (après le 23 avril 1705, et après le 28 janvier 1706); une possible interdiction de la quatrième partie en 1705 pourrait expliquer leur rapide disparition.

La création d'un périodique rassemblant des textes que leur faible taille rendait vulnérables répondait au souci des lettrés du début du XVIIIe siècle: Leibniz collectait ces brochures pour les bibliothèques de Hanovre et de Wolfenbüttel et la Bibliothèque volante de Jolli, parue à Amsterdam en 1700 et 1701, put inspirer le dessein des journalistes parisiens. Mais ces derniers ne réunirent pas des textes de grand intérêt et leurs présentations des nouveautés du livre et des sciences empiétèrent un peu sur le domaine du Journal des savants dont les secrétaires de rédaction, Pouchard puis Raguet, étaient justement chargés de la censure des Pièces.

L'histoire des Pièces fugitives et celle du Journal des savants se croisèrent d'ailleurs de plusieurs façons: les premières dérivaient du dessein originel du second, leur création influença peut-être la reprise, en 1704, de la publication d'une édition in-12 de celui-ci à Paris, enfin le second libraire des Pièces, Pierre Giffart, ayant pris goût aux revues littéraires publia en 1707 le Supplément mensuel du Journal.

Jean-Pierre VITTU

 


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© Universitas 1991-2024, ISBN 978-2-84559-070-0 (édition électronique)